Archives mensuelles : janvier 2016

Poème des essences – Leonid Dimov

 

Passaient les heures, et les nuages, les mamelouks
Et j’ai rêvé de mes babouches perdues au souk…
Même si je savais depuis mon oisive jeunesse
Que le discursif, l’ironie, les images d’allégresse
N’ont pas leur place dans des cadences :
La poésie va aux essences.
Mais moi, un écolier, tête de pioche,
J’avais égaré – en salles ou couloir – mes babouches
Et je les cherchais, pendant le cours de physique,
Même si on me reprochait mon absence métaphysique,
Par tous les autres versificateurs de la cité,
Comme quoi j’errais parmi les ronces, en évitant les pavés.
Je cherchais donc, mes babouches bleues chéries
Par-dessous les bancs, la cathèdre, la casquetterie
(En clair le rang de casquettes dans leurs patères,
S’il m’est permis que je gère
Le pouvoir de donner au mot une raison
Autre que celle offerte à la consommation),
On sait qu’à partir d’une certaine ancienneté
On peut chercher un bouton toute une éternité,
Qu’on peut au petit hasard appeler Untel,
Pour qu’il lance un rayon du bougeoir au ciel
Et redonner au paradis une touche
Tout en cherchant ses babouches,
De nuit en vastes salles de marbre polychrome,
Terrorisé en routes qui ne mènent à Rome,
Qu’on peut cueillir chaque jour à son gré
Quelque boule ou quelque galet,
Tel que fit icelui de postal facteur
(Qui du nom d’une pièce d’échecs fut porteur)
Ramenant aux bourgeois le câble ou la quittance
Bâtit un palais qui laissa bouche bée toute la France.
*
Traduit du roumain par Cindrel Lupe.
*
Lisez l’original en roumain = http://wp.me/p1wz5y-yd

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Presque ça – Gheorghe Pituţ

 

Ce galop étrange
de l’orage sur les
collines de Transylvanie,
les parents courent
vers les maisons qui fichent le camp,
la peau des nuages craque
et les lourds torrents arrivent pointus
comme les serpents d’autres temps-
sapins pousses par les galets
truies aux dents retors
nagent avec les porcelets pendus aux tétons
les cerfs touchés
par l’haleine des loups
s’arrachent les cornes aux branchages,
le monde s’emmêle
tel qu’au moment premier ;
j’entends comment pourrit la colline
qu’un instant j’ai pensée.
Et je ne suis rien qu’un cri
brisé d’une bouche d’un autre millénaire,
lorsque sans trace m’inondent
les déluges de la matière.
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Traduit du roumain par Cindrel Lupe
*
Lisez l’original en roumain= http://wp.me/p1wz5y-y9

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Classé dans Gheorghe Pituţ