Archives de Catégorie: Romulus Vulpescu

Le Diptyque des Rois – Romulus VULPESCU

ADALBERT cerf vert:
Serpe, fier-celte, haubert.

BLEGOSLAV l’esclave
Rave-grave, slave suave.

CLEOBULE le nul:
Pitt bull, pête p’tit-cul.

DEIFOBE le snobe:
En robe, gobe, mort-probe.

EVARISTE le triste:
Piste mixte, kyste, ciste, liste.

FERIDUN le brun:
Fier bruni, trône Hun.

GOLIATH le croate:
Tchate, mate, tâte une chatte.

HOLOFERNES le terne:
Cernes, yeux-fermes, paterne.

ISRAFEL le bel:
Zèle, gèle, elfe fidèle.

JIVOMIR le sbire:
Tirelire, sylphe-vampire.

KENNICOTT l’escot:
Pied-bot, lord bigote.

LISIMACE le trace:
Face-basse, grâce vorace.

MAUSOLE le fol:
Faux-col, ras-le-bol.

NEGROPONTE le ponte:
Blond comte, prompt ton monte.

OLDERIC ludique:
Tique, clique bique en crique.

PERIBEE l’abbé:
Périt, bée, lave-blé.

QUERIGUT la brute:
Gros rut, croûte gratte, goûte.

REGINALD le pâle:
Fard, smart, art final:

SIGISMOND le blond:
Calice-pisse, tout rond

SAHGIHAN le vanne:
Plane crâne âne qu’ahane.

TEOFRASTE le caste:
Faste, flasque, faux fil chaste.

TATALIN le fin:
Feint la faim, brin, crin.

UNTERBECK le sec:
Bec en cake, quel mec

VICLENIDE le vide:
Vil mythe, myrte, ride, guide.

WALDEMAR le rare:
Criard boyard, gare.

XISUTHROS le gros:
Rote trop, trisse en pro.

YLDEGUS le gus:
Suce-pouce, douce mousse pousse.

ZUMBALAY qui baille:
Faille, caille, rien qui vaille.

*
Traduit du roumain par Cindrel Lupe.
Lisez la version en roumain =

https://versionroumaine.wordpress.com/2017/09/26/pomelnicul-regilor-romulus-vulpescu

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Le sentiment des jours – Romulus Vulpescu

La guerre commence toujours un dimanche vers dix heures du matin
Et, si le temps est clair, jusqu’au six heures du soir, plein d’héros ont péri.
Pour la paix, la sobriété est de rigueur, un air pas trop câlin :
La paix se conclut à l’aube, d’habitude à cinq heures, un jeudi.
 
Les femmes désirées s’offrent aux trois heures de l’aprème, un lundi :
C’est là qu’elles abandonnent contraintes, affaires, conventions.
Un peu tristement, voire lointain (la raison ne put être établie),
Elles prennent congé au vermouth, vendredi treize heures, après collation.
 
Les enfants naissent plutôt – je remarque – mardi en soirée :
L’heure qu’ils préfèrent vers sept heures et quart – asses hâtif.
Samedi vers quatre heures des parents on se sépare,
Les accompagnant pour un voyage plutôt long et, sûrement, définitif.
 
Mercredi seulement, les heures traînent, en attendant :
Mercredi seulement l’indifférence me guette et sans aucun atout.
Mercredi seulement je partirai, en heure sans temps, chais pas quand :
Mercredi seulement il ne se passe rien du tout.
*
traduit du roumain par Cindrel Lupe
*
Lisez l’original en roumain :
http://wp.me/p1wz5y-pS

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Vine vremea – Romulus Vulpescu

Pour prouver que la lecture de la poésie se fait avec
des yeux de l’âme parfois différents, nous vous offrons
nos deux variantes en traduction française, du même poème.
Cindrel Lupe / Tudor Mirică
Vient un temps
 
Vient un âge, vient un présage, vient un temps
Vient une somme, vient une voix, vient, nomme
Nomme le jour, nomme l’heure, nomme l’instant majeur,
Appelle, part, vient, est !
Vient la douane qui estime ma part d’honoraires,
Vient la douane et la geôle, pour mes mauvaises erres.
Vient le jour pour mettre en berne mon disque solaire
Vient le jour que je devienne brise, ciel et air clair.
Vient l’annonce qui me suggère de ne respirer guère,
Vient la rumeur qu’il fera frais sur l’itinéraire,
Vient l’instant qui fait si mal, écrit dans l’annuaire,
Vient l’instant d’offrir fortunes sans aucun pourboire.
Vient cet âge qui embrase le lit du cauchemar,
Vient cet âge de la rigueur et du sommeil sommaire
Vient l’instant pour que frissonne le mythe nécessaire,
Vient l’instant pour des agnelles dans l’herbe de choir.
Vient le temps que j’aille aux sources, encore les revoir,
Vient le temps que je fleurisse, et en fruits y croire.
Vient une somme, vient une voix, vient, nomme
Appelle, part, vient, est !
*
traduit du roumain par Cindrel Lupe.
 
***
 
C’est un temps
 
C’est un âge, c’est un geste, c’est un temps
C’est un rappel, c’est une voix, arrive, appelle
Appelle le jour, appelle l’heure, appelle l’instant de l’heur
Appelle, part, arrive, l’est !
 
C’est le rappel de la valeur de ma tranche d’air,
C’est le rappel de l’élingueur, car je fus pillard.
C’est le jour du maquilleur pour mon disque solaire,
C’est le jour d’être meilleur, ciel et air clairs.
C’est l’annonce du bailleur que je paye mon aire,
C’est l’annonce de l’envoyeur pour l’itinéraire,
C’est l’heure de la douleur, lue dans son horaire,
C’est l’heure pour cet heur que je laisse repère.
C’est l’âge pour la torpeur d’une vie solitaire,
C’est l’âge de la rigueur, du repos sommaire.
C’est l’instant de la splendeur, mythe nécessaire,
C’est l’instant quand les fleurs sortent en lumière.
C’est le temps pour que d’ailleurs je retourne en haire,
C’est le temps du cueilleur, pour ces fruits amers.
 
C’est un rappel, c’est une voix, arrive, appelle
Appelle, part, arrive, l’est !
*
traduit du roumain par Tudor Mirică
***
lisez l’original en roumain :

http://wp.me/p1wz5y-c6

***

 

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Les livres partirent de la demeure – Romulus Vulpescu

Les livres partirent de la demeure
en commençant l’ultime voyage
et le discret parfum des pages
dans une chaîne de pièces vides erre.
Au casier, une loque d’ouvrage
s’agrippe, de sortir n’obtempère ;
l’absence des livres elle m’atterre.
Les confrères qui veillent sur mon rêve
en empyrée sont transférés,
et à mon tour de constater
que mes écrits eussent la vie brève.
Mais j’espère, en trépas effilé,
qu’en poudre de livre je me changerai.
*
traduit du roumain par Cindrel Lupe.
Lisez l’original en roumain :
 
http://wp.me/p1wz5y-b9

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Chaque jour – Romulus Vulpescu

Nous passons chaque jour à nous moquer
Des oiseaux, de la mer, de la tendresse
Sans y penser que pour les remplacer
Il ne nous reste qu’un désert de détresse.
 
Nous envahit la flemme d’une idée
Anéantie par une réticence
On y repense en milieu fermé
Qui interdit aux yeux toute jouissance.
 
On se tortille sur un drap morose
Si esseulés ensemble, par couardise
En nous trompant avec des bouches qui posent
De la scorie sur nos baisers qui s’usent.
 
On se retrouve trop nus et pathétiques
Sur une pas tolérable marche triste
Trop méfiants et seuls, trop désertiques
Pour savoir que l’amour encore existe.
 
Nous passons chaque jour à nous moquer
Des oiseaux, de la mer, de la tendresse
Sans y penser que pour les remplacer
Il ne nous reste qu’un désert de détresse.
*
traduit du roumain par Cindrel Lupe.
lisez l’original en roumain :

http://wp.me/p1wz5y-5V

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Tapis enchanté – Romulus Vulpescu

Poète, dramaturge et traducteur, né en 1933.
Il porta superbement en roumain, parmi d’autres,
Villon, Rabelais, Jarry.
Les Français lui doivent au moins ça...
 
*
Sur la trace du désert parsemée de débris,
M’avait accueilli un marchand de tapis ;
À la borne de halte érigée en pagaille
Il avait déchargé son frusquin – de pénaille :
Boukharas verts, Tébrises écarlats –
Rabais et soldes des tant de califats
Là où le sable a consenti son trêve ;
Lucide, vers morgana, ma bleue oasis du rêve,
Je vacillais entre d’atroces choix…
Mais au sourire oriental – mielleuse voix –
Il m’étala une relique grise de Ghase.
Candide, ne méfiant d’aucune hypostase
Dupé par sa misère creuse et flagrante,
Fus arrêté du chemin par les courbettes tentantes ;
Sordide ce négoce, ignobles ces tapis !
En débutant le marchandage compris,
Compatissant, aux politesses du Couchant,
J’ai tout traité déteint et nonchalant,
Et fus persuadé par le roué loufoque
De lui acheter un Mossoul, une loque
(Et même prétendait-il, sans trop de hontes
Que ce serait l’ tapis volant des contes !),
Vers le coucher j’étais déjà séduit ;
En l’empoignant, trophée décrépit,
J’avais choisi le plus caché endroit
Pour m’en couvrir comme si c’était un toit.
Entre les dunes s’étant logé un froid méchant
J’ai entendu le vieil tissu en me parlant :
« Pareils à toi, le soir emmaillotés,
Cortèges de voyageurs y sont passé
Depuis qu’un siècle un autre siècle le suit,
Ici, dans le désert, se trouve l’abri
De ce trompeur, vendeur exquis :
Que de rêveurs n’a-t-il roulé dans ses tapis !
Rappelle-toi ses yeux aussi que son râble :
Car il a vu comment naquit le sable
Que sasse depuis entre ses doigts, afin qu’il sache
Le sablier de l’éternel toujours en marche.
Mauvais vents soufflent, des crépuscules baissent,
Les âges broient les troncs purs des cyprès,
L’océan sèche, bouté hors de ce monde,
Il tient à tous ces morts leur compte,
En épiant au grandes routes des déserts malsains
Aux Brousses en lambeaux, Shirazes incertains,
Tant de générations leurs ont marché dessus
Rentrées depuis dans le rien confus
Enregistrant toujours, assidûment
Tout ce qui vit et passe au néant,
T’espères encore, ton âme de reclus,
Mais le corps éparpillé n’existe plus :
Déjà bluté par ma trame effilée
Un coup aigu de vent l’avait porté
Vers les oasis aux féconds auspices
Pour ensevelir la feuille dans les silices.
Le sable où ta chair fut transformée
Un brin seulement de ma fibre fanée
Quand le matin seras désert lointain
Et l’envol du vent te portera soudain
Sur longue, l’infinie voie de la mort,
Comme le rêvé tapis des contes,
Moi, brossé, sinistre, aux attentes
Quelqu’un d’autre je guettai à qu’il me vende
Sur la trace du désert, aux ossements
L’éternel marchand qui toujours ment.”
(1963)
*
traduit du roumain par Tudor Mirica
*
lisez l’original en roumain :

http://wp.me/p1wz5y-1G

 
 
 

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