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Le Paradis – Ioanid Romanescu

quand les poètes existent c’est une merveille
les poètes ne naissent pas sont déjà nés
les poètes ne dorment pas seulement ils rêvent
et des poètes on n’en a jamais assez

les poètes n’ont ni religions ni dieux
les poètes n’attendent jamais sur le parvis
les poètes n’écorchent pas la liberté
ils sont les plus angéliques des insoumis

les poètes n’ont pas de familles mais d’égéries
les poètes par exemple ils sont tous
ceux qui laissent le monde entier aux autres
les poètes s’écoulent toujours durant la nuit

les poètes ont une manière pas croyable
les poètes jamais rien ne les entoure
c’est une honte de vaincre les poètes
un sacrilège de leur donner une seconde nature

les poètes ne savent même pas ce que
en veut dire être immortel ou mortel
– leur vie dure le temps d’une chemise –
les poètes ont un paradis à eux tous seuls
*
traduit du roumain par Cindrel Lupe
*
Lisez l’original en roumain :

https://versionroumaine.wordpress.com/2017/04/04/paradisul-ioanid-romanescu

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Sur les poètes et la poésie – Ioanid Romanescu

 
L’école de poésie
 
… et même que j’apprends M’sieur le Professeur
et même que je vous aime Madame le Professeur
mais la poésie ne veut point m’écouter
les mots arrivent en meute avachissent l’idée
tant j’efface que le papier ne m’est pas suffisant
la leçon du jour je l’ai écrite sur le mur
et même que je ne l’ai pas achevée
la diversion me travaille la mémoire
je crois que Sémonide peine encore
à nous dire ce que divinité veut dire
car étant un poète il loge le démon
 
je reconnais la fenêtre, par contre moi
du fait que je suis inscrit sur la liste
des absents à la marche quotidienne
je ne suis pas coupable demandez
à Homère le chef de la classe comment
le porte drapeau de notre équipe olympique
a froissé ledit Edgar Poe
car la nuit dernière il n’avait pas
autre sujet de rigolade
 
Vous me dites de venir avec des parents ou tuteurs
comment les amener
Eminescu à l’hôpital Verlaine ivre mort
Petöfi en pleine révolution les soeurs Brontë en plein rêve
Lermontov cherche sa balle Browning son épouse
Gautier parmi les ruines Musset joue aux échecs
Pouchkine au duel Shelley en baignade
 
Byron à la guerre von Kleist avec sa fiancée
Chénier en route vers la guillotine Vico vers l’académie
Quevedo en disgrâce Shakespeare à la pèche
Gongora cherchant des prêts Malherbe à la cour
Villon dans la geôle Pétrarque dans l’église
Dante en exil Brunetto Latini cueillant du folklore
 
pardon j’ai un lapsus mais dorénavant
notre arbre généalogique
ni l’empereur Auguste ne le connaît trop bien
vu qu’il a envoyé Ovide dans les roseaux
et il protège Virgile
 
moi tout ce que j’ai fait j’ai cassé la vitre
pour que ma muse enceinte puisse entrer
accoucher de mon poème
pour quoi la laisser vaquer elle n’est pas la Vierge Marie
ni la catin du régiment
 
d’avoir tant fait ma leçon j’ai mal au coude
regardez le mur
un de ces jours pourra passer
et la copier n’importe quel butor
comme Rimbaud fit et ainsi on a vu Baudelaire
lui tirant la manche en clignant de l’œil :
très bien, petit gamin! les affaires sont prospères!
*
traduit du roumain par Cindrel Lupe
*
Lisez l’original en roumain :
http://wp.me/p1wz5y-sg

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Pensées de Ioanid Romanescu

Je m’fais la barbe et pleure
 
Dès que l’octobre apparaît
j’enlève encore un an de ceux qui m’sont restés
et dis : je mènerai ma vie comme les autres
de toutes les conneries je me défais !
mais je n’sais pas comment m’arrive si vite
d’oublier ce qu’âprement j’ai décidé
et me réveille malade ici, parmi les livres
tel l’oiseau qui oublie comment planer
je m’fais la barbe et pleure car ce soir
aucune des fêtes ne m’est dédiée
mais partirai-je sans but, tant j’ai ignoré
la promesse de l’instant remplie d’humilité
…parti à peine, je m’sens comme un fuyard
des cieux pas de la maison privée d’avenir
les bottes du temps me pèsent lourdement l’épaule
je marche seulement pour trouver un lieu d’où revenir
*
Si un Dieu existe
 
Lorsque je laisserai derrière moi l’ombre seulement
c’est pas vers la mort que je m’acheminerai
mais dans les bras de ma mère
tel un chacun qui arrive
dans les bras de celle qui l’a fait naître
comme la mère même est portée dans les bras
de sa mère qui est dans les bras
de sa mère qui est dans les bras
de sa mère …
j’imagine au-delà un monde qui rêve
dans les bras d’une mère immense
si un dieu existe
il ne peut être qu’une femme
*
traduit du roumain par Cindrel Lupe
*
lisez l’original en roumain :

http://wp.me/p1wz5y-io

 

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